Codex Sinaiticus and the Manuscripts of Sinai in the NLR

Documents relating to the acquisition of the Codex Sinaiticus by Russia

(The Archive of Foreign Policy of the Russian Empire, AVPRI; the Russian State History Archives, RGIA)

C. Tischendorff's memorandum to Minister of Public Education, E.P. Kovalevsky
dated 30 Mart / 11 April 1860

RGIA, f. 735, op. 4, d. 62, fols. 260r-263v.

[fol. 260] <…> Après avoir trouvé ce Ms. au couvent du Mont Sinaï le 5 Févr. (nouv. st.), j’ai déterminé, le 14 Févr., le Supérieur du couvent au Caire de le faire venir à mes frais au Caire, pour que je puisse en entreprendre la copie. Dix jours après le Ms. m’a été apporté par le Supérieur. J’entrepris tout de suite la copie; j’y travaillais pendant 2 mois et demi. En me trouvant pendant tout ce temps en de relations personnelles avec le Couvent, je tâchais continuellement de le déterminer à offrir par mon intermédiare le Ms. comme hommage à S.M. l’Empereur Alexandre II. A la fin du mois d’Avril le Supérieur me déclara que le couvent y consentait. À cette époque arrivaient de Constantinople plusieurs membres de différents couvents Sinaïtiques pour l’élection d’un nouvel archévêque. Cette élection étant unanimement faite, le jour après Pâques, le nouvel archévêque vint me voir. Tout en confirmant l’intention du couvent de me rendre le Ms. comme un présent pour S.M.I., il m’exposa que cela ne pouvait guère avoir lieu avant qu’il n’aurait reçu, comme archévêque et chef des Sinaïtes, sa consécration par le Patriarche de Jérusalem. Comme il croyait que dans 3 mois cette consécration serait accomplie, je déclarais mon intention d’aller en attendant à Jérusalem, à Smyrne, à Patmos, en m’engageant de revenir au Caire après 3 mois, pour prendre le Ms. L’archévêque et tout le couvent approuvèrent ce plan. Les derniers jours du mois de Juillet je revins au Caire. Mais alors j’appris que la consécration n’avait pas encore eu lieu, parce que le Patriarche de Jérusalem s’opposait gravement à la personne de l’archévêque. Celui-ci avec ses amis se rendit chez moi pour m’exposer l’affaire, en me sollicitant d’intervenir pour lui autant [fol. 260v.] que possible. À cet effet j’écrivais incessamment au Consul Général à Alexandrie Mr. de Lagovsky, de même à S. Exc. le prince Lobanow à Constantinople. L’archévêque ne voulait pas faire lui-même ces démarches, pour ne pas confirmer le soupçon du Patriarche de Jérusalem, soutenu aussi par le Consul Grec à Alexandrie, que l’Archimandrite Cyrille fût trop partisan Russe — il porte aussi une décoration Russe — pour être bon archévêque du Sinaï. Mais pour pouvoir mieux aider la cause des Sinaïtes, étant si intimement liée avec l’affaire du Ms., je me suis décidé d’aller moi-même à Constantinople auprès le Prince Lobanow et de lui faire connaître parfaitement les intérêts dont il s’agissait. Le couvent en était énchanté; je promis de ne pas revenir avant la confirmation officielle de leur archévêque, après laquelle le Ms. me devait être délivré pour pouvoir le porter aux pieds de S.M.I. Vers le milieu du mois d’Août j’arrivai à Constantinople et de même à Bujukdéré. Le Prince n’avait encore fait aucune démarche en faveur des Sinaïtes; mais il prenait l’intérêt le plus vif à toutes mes expositions sur l’affaire. J’acceptai son offre de loger chez lui pour quelque temps. Avec ses conseillers il examina mûrement la question; après avoir reconnu le droit incontestable des Sinaïtes, il se décida d’intervenir pour eux auprès le Grand Vezir et Fuad Pacha, en se rapportant aussi à mes communications et mes témoignages. Le couvent avait déja envoyé depuis Pâques 5 députés; mais tous leurs efforts étaient restés inutiles jusqu’alors. Ils m’accueillirent avec la plus grande satisfaction, en fondant toute leur espérance sur mon intercession auprès le Prince Lobanow et conséquemment sur les démarches de S. Exc. même. Je restais 5 semaines à Constanitnople infatigablement occupé de l’affaire. L’opiniâtreté de S.S. le Patriarche de Jérusalem étant restée invincible, malgré les meilleurs dispositions du Gouvernement de la Subl. Porte, le seul moyen de faire triompher la juste cause paraissait d’engager l’archévêque des Sinaïtes de se rendre lui-même à Constantinople, muni de tous les documents officiels, et de récourir à [fol. 261] un concile composé de tous les hauts dignitaires de l’Église à Constantinople. Je partis le 23 Septembre pour proposer cela au Couvent de Caire. Mais avant de partir de Constantinople, je croyais avoir trouvé le moyen d’obtenir le vieux Ms. même avant la consécration de l’archévêque. Demande-t-on pourquoi j’attachais tant d’importance à ce que le Ms. me fût donné tout de suite ? C’est que je regardais comme indispensable d’emporter moi-même le Ms. en Europe, pour pouvoir être sûr que la convention préalable relativement à la donation ne fût troublée par des intrigues de toute sorte, qui s’étaient déja manifestées depuis que le bruit de ma découverte s’était repandu. Voilà donc mon moyen. Je proposai au Prince Lobanow de munir de son autorité un document conçu ainsi:

“ Très-révérends Pères du Mont Sinaï,

Mr. Tischendorff m'a communiqué que la vénérable confrérie du Mont Sinaï s'est proposé d'offrir par son intermédiaire un vieux Ms. biblique comme hommage à S.M. l'Empereur Alexandre II. Cette offre ne pouvant pas être officiellement exécutée avant que le Supérieur nouvellement élu ne soit reconnu par la Subl. Porte, Mr. Tischendorff désire emporter, en attendant, à S. Pétersbourg le dit Ms. à titre de prêt, pour y pouvoir pendant l'impression contrôler sa copie d'après l'original. En appuyant ce désir de Mr. Tischendorff, je déclare que dans le cas où il serait jugé possible d'y déférer, ce Ms. resterait la propriété de la confrérie du Mont Sinaï, jusqu'à ce que le Supérieur au nom de cette confrérie l'ait officiellement offert à S.M.I. Il va sans dire que, si des circonstances imprévues empéchaient la confrérie de donner suite à cette intention, le Ms. lui serait immanquablement restitué. En me recommandant à vos saintes prières” etc.

<…>Upon discovering the manuscript at Sinai Monastery on 5 February /New style/, I spoke to Cairo House Superior on 14 February, persuading him to have the manuscript brought to Cairo, on my own account, for me to copy it. Ten days later, the Superior gave me the manuscript. I began copying at once, which took two months and a half. Maintaining personal relations with the brethren all the time, I repeatedly urged them to present the manuscript, through my mediation, to His Majesty Emperor Alexander II. Towards the end of April the Superior informed me of the community's consent. At that time many monks arrived from various monasteries relating to Mt Sinai to elect the new Archbishop. The Archbishop elected unanimously on Whit Monday came to see me. He confirmed the community's intention to give the manuscript to me as a present to His Majesty the Emperor and explained that it could not be done before he was ordained as Archbishop of Sinai by the Patriarch of Jerusalem. Since he believed that the ordination would take place within the next three months, I declared my intention to visit Jerusalem, Smirna and Patmos in the meantime, promising to return for the manuscript three months later. The Archbishop and the whole community accepted the plan. I came back to Cairo towards the end of July. But then it appeared that the ordination did not take place because the Patriarch of Jerusalem had grave objections against the nominee candidate. The latter came to me with his friends to explain the matter, asking me to intercede if possible. To that end I wrote to General Consul in Alexandria, Mr. Lagovsky, and even to His Excellency Prince Lobanov in Constantinople. The Archbishop would not take any steps on his own in order not to support the suspicions felt by the Patriarch of Jerusalem, shared by the Greek Consul in Alexandria, of his unwarranted commitment to Russia - Archbishop Cyril even being awarded a Russian order - for his election as Archbishop of Mt Sinai. For more effective support to the Sinaitic cause, so closely associated with the manuscript, I decided to see Prince Lobanov in Constantinople and give him a better insight in the interests involved. The brethren were delighted by the idea; I promised not to return before official ordination when the manuscript would be given to me for presentation to His Majesty the Emperor. I came to Constantinople and then to Bujukdere in mid-August. The Prince had taken no steps for the Sinaitc cause yet but showed interest in my description of the matter. I accepted his invitation to stay a while. Together with his advisers, he investigated the problem with care; recognizing the irrefutable righteousness of the Sinaitic cause, he decided to intervene for them before the Grand Vizier and Fuad Pasha, relying on my information and evidence. Since Easter the community had already sent five representatives but the efforts proved futile. They received me with utmost pleasure and placed their hopes on my intercession with Prince Lobanov, and, consequently, on the actions of His Excellency. I stayed in Constantinople five weeks, tirelessly attending to the matter. Yet the obstinate Patriarch of Jerusalem could not be prevailed upon, despite the best favors of the Sublime Porte; thus the only way to win the righteous cause was to summon the Archbishop of Sinai to Constantinople, with all relevant documents, and convene the Council of all ecclesiastical authorities. I left on 23 September to inform the Cairo House thereof. Before leaving, however, I found the means to get hold of the manuscript even before the Archbishop's ordination. Why should it be so important to have the manuscript at once? I believed that I myself should take the manuscript to Europe to be sure that the preliminary agreement on presentation could not be broken by multiple intrigues following the rumors of my discovery. Here is the means I found. I suggested that Prince Lobanov would make the following document in his own name: [… Prince Lobanov's letter of guarantee is reproduced…]

Le Prince Lobanow m’obligea infiniment par son consentement à cette pièce, quoique il doutât qu’elle me ferait parvenir à mon but. La pièce est signée et datée: Minist. des Aff. Étrang., Légation Imp. de Russie à Const[antino]ple. Nr. 510, le 10 (v. st.) Septembre 1859.

Avec cette lettre j’apportais au Caire en même temps un paquet de lettres [fol. 261v.] de la part des députés Sinaïtiques. Arrivé au Caire vers la fin du mois de Sept[em]bre, je fus chaleureusement accueilli au couvent; l’archévêque avec les frères me témoignait la plus vive reconnaissance pour tout ce que, d’après les communications de leurs députés, j’avais fait pour eux. De mon coté je leur disais avec une pleine conviction que la réussite du couvent était certaine et qu’il ne fallait plus que peu de temps pour l’arrangement officiel. Quant au Ms., l’archévêque me dit, après avoir lu la lettre du Prince Lobanow: j’espère que cela pourra se faire. J’exprimai le désir que le lendemain tout fût décidé, pour pouvoir partir pour l’Europe avec le premier bateau Autrichien. Le lendemain je me présentai de nouveau au couvent. L’archevêque m’exprima officiellement les remerciments du couvent pour mon dévouement. Après cela la lettre du Prince Lobanow, traduite en Grec, fut présentée à tous les Pères. Tous acceptaient la proposition faite dans la lettre. De même me fut présenté un document se rapportant à la lettre du Prince Lobanow, mais exprimant seulement que le Ms. m’a été confié pour en pouvoir faire l’exacte publication. J’y souscrivis. Tout cela étant consigné dans le livre des actes du couvent, le Ms. m’a été délivré.

Donc le Ms. a été formellement déposé en mes mains pour pouvoir exactement publier son texte. C’est-là bien une affaire des plus importantes pour le monde littéraire; mais en même temps je n’ai regardé cet arrangement que comme un moyen d’assurer au Gouv. Imp. la donation de l’original. Le couvent lui-même y était tout d’accord avec moi. M’étant aperçu qu’ils désiraent me faire accompagner pour la présentation à S.M.I. par un député, je choisissait comme tel le frère Agathangelos, Supérieur du couvent au Caire et autrefois archimandrite à Kiew. L’archévêque approuva ce choix. Aussi étions-nous convenus qu’immédiatement après la consécration le Prince Lobanow m’en avertît et que le député fût expédié incessamment pour me réjoindre à S. Pétersbourg. Mais l’affaire se trainait encore …

Prince Lobanov most kindly consented to write the letter though doubted the effects. The letter was signed and dated: Ministry of Foreign Affairs, Russian Imperial Legation in Constantinople, no. 510, 10 September /Old style/ 1859.

Along with the letter, I brought to Cairo a parcel with letters from Mt Sinai representatives. On arriving in Cairo by the end of September, I was warmly received by the community; informed by the representatives, the Archbishop and the brethren expressed their heartfelt gratitude for everything. I for one told them in all confidence that the community was sure to succeed, and official settlement would not take long. With regard to the manuscript, the Archbishop said on reading Prince Lobanov's letter that "I hope it can be done". I hoped that the matter would be settled next day, intending to sail to Europe on board the first Austrian ship. On the next day I came to the monastery again. The Archbishop expressed official gratitude of the monastery for my loyalty. Then the Greek translation of Prince Lobanov's letter was produced for the brethren. They all accepted the offer. At the same time, I was given a document only saying, with reference to Prince Lobanov's letter, that the manuscript is given to me for the purpose of correct publication. I signed the document. When all these were entered in the Book of Community Acts, the manuscript was handed over to me.

Thus the manuscript was formally given to me exactly for the publishing purpose. While the matter is of utmost importance for the scholarly community, I also regarded the agreement as a means of presenting the original to the Imperial Government. The community was in full accord with the purpose. Finding that they also wanted their representative to present the manuscript, I chose Father Agathangelos, Cairo House Superior and former Kiev House Superior. The Archbishop approved my choice. So we agreed that Prince Lobanov would telegraph to me after ordination, and the representative would leave immediately to meet me in St Petersburg. However, this took longer than planned …

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